Pourquoi visiter Ouchgouli ?
Visiter Ouchgouli (Ushguli) en Svanétie est une expérience qui vous transporte aux confins de l’Europe, dans un lieu où le temps semble s’être suspendu. Perché à plus de 2 200 mètres d’altitude, cet ensemble de quatre villages est souvent présenté comme l’habitat permanent le plus élevé d’Europe, mais sa magie va bien au-delà de ce simple record.
Un paysage de toute beauté
Ouchgouli est d’abord un paysage d’une puissance minérale et sauvage inoubliable. Les villages, composés de maisons de pierre et de tours défensives médiévales (les koshkebi), sont littéralement adossés aux flancs des montagnes, face au mont Chkhara, le plus haut sommet de Géorgie (5.193 m) et de toute la chaîne du Grand Caucase. La vue sur ses glaciers éternels depuis les sentiers est l’une des plus grandioses du pays.
Au cœur de la culture svane
C’est aussi un musée vivant d’architecture et de culture svanes. Le village de Chazhashi, cœur historique, est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO pour sa concentration exceptionnelle de tours médiévales parfaitement préservées, certaines datant du IXe siècle. Se promener dans ses ruelles, c’est marcher dans un décor médiéval intact, habité par une communauté qui perpétue un mode de vie ancestral, basé sur l’élevage et une profonde indépendance. La tour Lamaria, la plus célèbre, veille sur les églises anciennes et leurs précieuses icônes.
Un paysage authentique
La sensation d’isolement et d’authenticité est l’un de ses principaux attraits. Accessible uniquement par une piste difficile (ouverte de juin à octobre) ou par plusieurs jours de randonnée depuis Mestia, Ouchgouli n’est pas un lieu de passage anodin. Y séjourner, ne serait-ce qu’une nuit dans une guesthouse familiale, c’est partager le quotidien des Svanes, goûter à leur hospitalité et à leur cuisine robuste, et comprendre la résilience d’un peuple qui a survécu aux invasions et aux éléments dans cette forteresse naturelle.
Un point de départ pour les randonnées
Enfin, c’est le point de départ de randonnées incroyables. Le sentier menant au pied du glacier de Chkhara ou la montée vers la forteresse de la Reine Tamar offrent des défis physiques récompensés par des panoramas qui resteront gravés dans votre mémoire. Visiter Ouchgouli, c’est accepter de ralentir, de s’imprégner du silence des montagnes et de se confronter à une forme d’absolu géographique et culturel, une expérience qui marque durablement ceux qui ont la chance de s’y rendre.
Comment visiter Ouchgouli ?
Accès et transport
Ouchgouli est accessible depuis Mestia, située à environ 45 km. La route, une piste de montagne difficile, est généralement praticable de juin à octobre. Vous avez trois options principales :
4×4 privé avec chauffeur : Le moyen le plus courant. Compter 150-250 GEL (aller-retour depuis Mestia) pour une journée complète avec temps de visite sur place. Négociez le prix et le programme à l’avance.
Randonnée pédestre : Le célèbre trek Mestia-Ouchgouli dure 3 à 4 jours et traverse des paysages sublimes. Il nécessite une bonne condition physique et un équipement adapté.
Transport local : des minibus (marshrutkas) ou des jeeps partagées partent occasionnellement depuis Mestia lorsque la demande est suffisante, pour un coût moindre mais avec moins de flexibilité.
Déroulement de la visite :
Une fois à Ouchgouli, l’exploration se fait à pied. Le site comprend quatre villages reliés par des sentiers. Commencez par le village de Chazhashi, classé à l’UNESCO, pour admirer la plus forte concentration de tours médiévales (koshkebi). Visitez l’église de la Mère de Dieu (Lamaria) du XIIe siècle. Ensuite, montez jusqu’à la forteresse de la Reine Tamar (environ 30-45 minutes de montée) pour une vue panoramique imprenable sur les villages et le mont Chkhara. Prévoyez plusieurs heures pour cette exploration.
Logistique :
Hébergement : de nombreuses guesthouses familiales offrent une expérience authentique avec demi-pension (compter 40-80 GEL/nuit/pers.). Réservez à l’avance en haute saison.
Restauration : les guesthouses servent des repas maison copieux. Emportez de l’eau et des snacks pour vos randonnées.
Conseils pratiques :
Saison : Juillet et août sont les mois les plus sûrs pour l’accès. En mai, juin ou septembre, vérifiez l’état de la route.
Équipement : Chaussures de randonnée robustes, vêtements chauds et imperméables (la météo change vite), crème solaire, jumelles.
Argent : Prélevez assez de Laris en espèces à Mestia ; il n’y a ni distributeur ni paiement par carte à Ouchgouli.
Derniers moments à Ouchgouli, emporté par la puissance de la rivière Enguri
Mardi 12 juillet. De retour à l’hôtel, je repars aussitôt au bas de notre maison d’hôte (j’en parlerai dans l’étape suivante) pour faire quelques photos de la rivière qui passe juste à proximité.
Depuis le petit pont qui enjambe les flots tumultueux de l’Enguri, j’ai une vue parfaite pour faire quelques photos intéressantes. Je vais même profiter du garde-corps assez large pour supporter mon appareil-photo afin d’entamer une série de poses longues. Chouette alors ! Quand on n’a pas de trépied à sa disposition, il faut savoir faire preuve de débrouillardise, c’est ce que je vais faire ici en utilisant le garde-corps.
Mais ce n’est pas gagné d’avance, car pour réaliser ces quelques clichés, il me faut entre quatre et six secondes de pose, du fait que je réalise la série en plein jour. Heureusement, le soleil ne fait pas des siennes. Le seul problème, ce sont les allées et venues des gens sur le pont, car la moindre vibration vient gâcher la pose… Et je ne compte pas le nombre de photos que j’ai dû mettre à la poubelle avant d’arrivée à ce résultat !
Mais bon, à force de persévérance et de patience, je parviens à un résultat plutôt correct. Du coup, la rivière Enguri, par la magie de la pose longue, se fige dans le temps, s’apparentant comme par magie à une rivière glacée !
Souvent les gens me demandent comment je parviens à réaliser de tels clichés, et souvent je leur réponds : la chance ! Car, il faut bien l’admettre, il en fallait un peu pour que le pont soit d’abord placé à bonne hauteur de mon sujet, et surtout pour qu’il ne soit pas atteint par les vibrations de la rivière en crue !
Je vais donc rester là, sur ce petit pont de bois, une bonne trentaine de minutes, profitant du fait que ma fille se prépare avant que nous repartions vers de nouvelles aventures. Franchement, je ne me lasse pas d’un tel paysage. Il est si rare que le mariage entre la nature et l’homme soit si étroit. Et à dire vrai, la Svanétie et ses espaces sauvages et indomptés sont vraiment idéaux pour ça.
Je me plais tellement à observer cette rivière en crue, que je vais me rappeler que lors de notre arrivée au village, la veille au matin, la vue sur le hameau et les autres petites communautés était encore plus belle à une centaine de mètres de la route principale… Mauvaise idée.
Car pour me rendre jusqu’à ce point de vue que j’avais repéré la veille à notre arrivée, il me faut d’abord marcher une bonne centaine de mètres sur la route principale qui est, je vous le rappelle, maculée de boue et de bouses de vache.
Et bien entendu, pour effectuer cette marche, je n’ai pas eu l’idée de changer mes tennis légers pour une bonne paire de chaussures de marche. Je vais âprement le regretter… Et très vite encore.
À peine, ai-je fait une cinquantaine de mètres sur la route principale que me voici devant une immense flaque de boue qui me barre le passage. Pas celui des minibus chargés de touristes qui remontent le chemin jonché d’ornières.
Pour traverser cette immense flaque (et éviter de me faire écraser par les bus !), il ne me reste plus qu’à sauter et espérer passer de l’autre côté… Grave erreur ! Car à peine je me réceptionne de l’autre côté de la flaque que me voici parti en vol plané non contrôlé ! J’ai beau essayer de me stabiliser, mais je me retrouve les quatre fers en l’air et les fesses en plein au milieu de la flaque de boue et de bouses !
Je me relève tant bien que mal, et voilà que je reglisse encore ! Et cette fois-ci, je manque partir sur le bas-côté de la route et tomber carrément dans la rivière. Je ne dois mon salut qu’à la présence d’un tuyau d’évacuation des eaux auquel je me rattrape in extremis !
Enfin, je parviens à me remettre debout. C’est à ce moment-là qu’un minibus qui n’a que faire de savoir si j’allais tomber ou pas dans la rivière en crue passe en m’aspergeant une nouvelle fois de boue et de merde de vache !
Me voici trempé jusqu’aux os et maculé de boue et de bouses de la tête aux pieds ! Il me faut maintenant repartir dare-dare à l’hôtel pour me changer. Sur le chemin du retour, je ne regarde même pas les gens que je croise qui s’interroge tous de savoir si je suis tombé dans la boue… « Bien sûr que je suis tombé ! Et pas qu’un peu ! ».
Après cinq petites minutes de marche (qui m’ont paru une éternité), me voici de nouveau dans la petite courette de notre maison d’hôte. C’est maintenant que je m’aperçois de l’état lamentable dans lequel je me trouve… Et dans lequel se trouve mon appareil photo tout neuf, que j’ai acheté il y a trois semaines de ça… Arghhhhh !
Depuis l’entrée de la maison d’hôtes, j’appelle Vera à mon secours. Après quelques secondes, la voilà qui apparaît dans l’entrebâillement de la porte. Son regard trahit aussitôt mon état physique ! « Il vous faut vous changer ! », me dit-elle. Elle me demande de me déchausser et de foncer droit vers la douche… Mais à peser le pour et le contre, entre mon corps maculé de merde et mon Z6 tout neuf tout barbouillé de boue, je n’hésite pas une seconde. « Vera, il me faut une serviette mouillée, s’il vous plaît. Il me faut nettoyer mon appareil tout de suite, sinon la boue va sécher et le mettre hors d’état… »
Après quelques secondes d’hésitation, mon hôtesse comprend ma situation, et elle revient aussitôt avec une serviette humide que j’accepte bien volontiers.
Et c’est donc dégoulinant de boue et de merde que je vais commencer à nettoyer mon boîtier neuf. Il me faut agir vite et commencer par les parties les plus vitales de l’appareil : la zone de contact avec l’objectif qui doit être absolument propre et le compartiment de la batterie et des cartes où la boue et l’humidité peuvent s’infiltrer.
Le nettoyage complet de mon appareil, bretelle comprise, va me prendre au moins 45 minutes. Pendant ce temps, la boue qui me recouvre commence à sécher sur moi. Mais je n’ai pas le choix. Je dois d’abord sauver mon boîtier avant de penser à moi. Et c’est ce que je vais m’appliquer à faire au milieu de cette cour ferme, devant l’entrée de la tour svane.
Après quoi, enfin, je peux penser à pénétrer à l’intérieur de la maison, en ayant bien pris soin de laisser mes chaussures maculées de boue à l’entrée de la tour. Allez hop, direction la douche pour enlever la tonne de boue qui me recouvre de la tête aux pieds !
Un quart d’heure plus tard, c’est donc propre et frais comme un gardon (c’est le cas de le dire !) que je retrouve ma fille qui me demande comment je vais : « Bien, tout va bien, merci ! Quelque chose à signaler ? Non, tout va bien. Mon appareil-photo est sauvé des eaux et de la merde ! »
Après toutes ces émotions, et surtout ce séjour merveilleux dans la maison de Vera, il est grand temps pour nous de faire nos adieux. Je crois que jamais je n’oublierai tous ces moments passés dans cette famille si simple et si gentille avec nous.
Ah, j’allais oublier ! J’ai fait un selfie de moi quand je suis tombé dans la flaque de boue… Voilà l’état dans lequel j’étais en partie ! L’autre côté était encore pire.
Voilà, avant de partir je veux faire un dernier petit tour de cette Old House au milieu de laquelle trône cette espèce de caravane d’un autre temps qui a pu servir à dieu sait quoi. Abandonnée là, au milieu de la cour, elle restera encore là encore longtemps, je suppose. Et bien entendu, je ne manque pas de faire un dernier petit selfie avec Vera dont je me souviendrai encore longtemps de l’extrême gentillesse avec laquelle elle nous a reçues, ma fille et moi.
Comme je me souviendrais longtemps de cet adorable petit-déjeuner qu’elle nous a préparé et servi dans la partie commune de la maison. Et comme je me souviendrai de sa cuisine et de sa réception aménagées dans l’entrée de la pièce, du rire de sa fille et de ses petits-enfants venus lui rendre visite pour la journée depuis Mestia. Et c’est donc le cœur serré que nous allons quitter la Old House, une maison toute simple aménagée dans une tour svane. Jamais je n’aurai cru cela possible.