Pourquoi visiter le Fort Rouge, Jehangiri Maha ?
Un chef-d’œuvre architectural
Visiter le Jehangiri Mahal au sein du Fort Rouge d’Agra revient à pénétrer dans la sphère intime et politique des plus grands empereurs moghols. Ce palais, bien que souvent éclipsé par la renommée mondiale du Taj Mahal, est un chef-d’œuvre en soi qui incarne l’apogée créative et le faste de la dynastie moghole.
Un palais unique
Commandé par l’empereur Akbar pour son fils Jahangir, le Jehangiri Mahal est le plus grand palais privé du complexe du Fort Rouge. Son architecture est un témoignage du syncrétisme artistique qu’Akbar encourageait. Il marie avec grâce la monumentalité de l’architecture hindoue, visible dans ses piliers massifs et ses consoles sculptées, à la sophistication des arcs et des dômes de l’architecture islamique. En se promenant dans ses cours et ses salles, on explore la vision politique et culturelle d’un empereur qui rêvait d’unifier les traditions de son empire.
Un lieu de pouvoir et de harem
Contrairement au Taj Mahal, dédié au deuil et à l’éternité, le Jehangiri Mahal était un lieu de vie, de pouvoir et de harem. Il permet de comprendre le fonctionnement de la cour impériale. On y découvre les quartiers des femmes de la famille royale, les salles d’audience privée et les balcons qui offraient aux habitants une vue sur la rivière Yamuna. C’est imaginer les intrigues de cour, les fêtes somptueuses et la vie quotidienne qui animaient ces murs, bien loin du silence recueilli du Taj Mahal.
Intégré au Fort rouge
Enfin, la visite du Jehangiri Mahal est indissociable de celle du Fort Rouge dans son ensemble. Depuis les remparts du fort, la vue sur le Taj Mahal est l’une des plus iconiques de l’Inde. Elle permet de saisir le lien qui unit les deux monuments : c’est depuis ces appartements que l’empereur Shah Jahan, prisonnier à la fin de sa vie, contemplait le tombeau de son épouse. Visiter le Jehangiri Mahal, c’est donc compléter l’histoire en ajoutant la dimension du pouvoir, de la vie et de la tragédie familiale à la pureté du chef-d’œuvre qu’est le Taj Mahal.
Comment visiter le Fort Rouge, Jehangiri Maha ?
Accès et planification
Le Fort Rouge est situé au cœur d’Agra, à proximité de la rivière Yamuna. L’entrée principale se fait par la porte Amar Singh. Pour rejoindre Agra, le train depuis Delhi (Gatimaan Express ou Shatabdi) est la meilleure option. Sur place, un auto-rickshaw ou un taxi vous déposera à l’entrée. Le fort est ouvert du lever au coucher du soleil. Il est crucial d’arriver à l’ouverture (vers 6h00) pour éviter les foules et la chaleur, surtout entre avril et septembre. Un billet d’entrée unique donne accès à l’ensemble du complexe, mais vérifiez si le Taj Mahal nécessite un billet séparé.
Exploration du Jehangiri Mahal
Après avoir franchi l’imposante porte et les premières cours, dirigez-vous vers la zone des palais privés, au nord-est du complexe. Le Jehangiri Mahal se distingue par sa façade de grès rouge et son immense cour intérieure. Prenez le temps d’admirer la synthèse architecturale unique : les piliers massifs de style hindou, les arcs persans et les délicates sculptures de fleurs et d’animaux. Explorez les salles qui entourent la cour, imaginez leur fonction et levez les yeux pour observer les balcons et les jharokhas (balcons en encorbellement) d’où les femmes de la famille impériale observaient la vie du fort.
Conseils pratiques :
Prévoyez au moins 2 à 3 heures pour explorer le fort et le Jehangiri Mahal sans hâte. Engagez un guide certifié à l’entrée pour décrypter l’histoire et les détails architecturaux invisibles au premier regard. Depuis les remparts du fort, ne manquez pas le point de vue sur le Taj Mahal, surtout en fin de journée lorsque la lumière est la plus belle. Portez des chaussures confortables pour marcher sur les pavés et prévoyz de l’eau. Le Jehangiri Mahal, avec ses cours et ses salles, offre un peu d’ombre, mais la protection solaire reste nécessaire.
Fort Rouge, Jehangiri Maha, le palais de l'empereur Jehangir à Agra
Vendredi 28 avril. Bonne pioche. Mon 14 mm associé à mon plein format va faire des merveilles pour cette visite du palais de l’empereur moghol. Le grand angle prend ici toute sa dimension et donne aux arbres qui encadrent l’ancien jardin persan un mouvement incroyable. J’adore.
Me voici donc devant la façade de grès rouge de Jehangiri Mahal, le palais de l’empereur Jehangir. Il fut édifié au XVIe siècle, entre 1565 et 1569.
Comment évoquer la visite du palais de l’empereur moghol sans évoquer son fondateur, Akbar le grand lui-même ? Car Akbar n’était autre qu’un descendant du grand Gengis Khan, et comme lui, doté d’une grande ouverture d’esprit. Bien que quasiment illettré, il entreprit de profondes réformes, tant administratives (division du royaume en provinces) que culturelles. Mieux, en 1563, il décida d’abolir contre toute attente la taxe que devaient payer les pèlerins hindous. Dans la foulée, il leva les restrictions liées à la construction de temples hindous et rendit illégal la pratique du sacrifice rituel des veuves.
Mais Akbar fit encore plus fort pour maintenir l’unité du pays. Questionnant l’origine divine du Coran, il invita les représentants des grandes religions à débattre devant lui et en tira sa propre « religion de la lumière” », étonnant syncrétisme empruntant à l’islam, au christianisme et au jainisme.
Du coup, le palais mêle étroitement aujourd’hui encore styles hindou et musulman… Hommage aux religions différentes des femmes de l’empereur.
Une première cour intérieure ceinturée d’arcades permettait d’accueillir les étrangers avant qu’ils ne soient reçus par l’empereur. Des motifs géométriques s’entremêlent sur la pierre.
De là, partent d’incroyables corridors qui mènent à d’autres parties du palais.
Puis c’est une deuxième cour ouverte sur trois côtés qui donne directement sur le fleuve Yamuni. Il s’agit tout simplement du Khas Mahal, un somptueux palais de marbre et de grès rouge recouvert de stuc, construit par Shah Jahan pour ses deux filles préférées.
Au sommet du palais, entre les ouvertures, on peut observer les nombreux singes qui ont fait du palais leur demeure.
Le temps de redescendre le regard et on admire cette cour extraordinaire avec ses arcades et ses piliers finement sculptés.
Des bulbes à coupole surmontent les tourelles qui encadrent la cour.
À y regarder de plus près on comprend avec quelle minutie, quel souci du détail les sculpteurs ont œuvré pour reproduire fleurs de lotus et autres oiseaux.
Dans le prolongement du Khas Mahal, en suivant le mur d’enceinte qui donne sur la Yamuni, voici le Musamman Burj.
Autrefois, un petit palais de marbre construit par Akbar était situé sur ce site, qui fut ensuite démoli par Jehangir pour ériger de nouveaux bâtiments. Shah Jahan à son tour a choisi ce site pour ériger la tour de marbre à plusieurs étages incrustée de pierres précieuses pour Mumtaz Mahal, son épouse.
Le Musamman Burj est composé de lattes de marbre délicates avec des niches ornementales afin que les dames de la cour puissent regarder dehors.
Musamman Burj a été construit entre 1631 et 40 et offre une vue lointaine sur le célèbre Taj Mahal.
Ce fut plus tard ici que Shah Jahan fut emprisonné par son fils Aurangzeb. De là, il avait vue sur le tombeau de sa bien aimée. En contrebas, il pouvait observer les deux enceintes du palais, la première occupée par des douves et la deuxième… par des lions et des tigres. Il mourut ici en 1666.
Je poursuis la visite. Les palais s’entremêlent tellement tous les uns avec les autres qu’il est difficile pour un non initié comme moi de reconnaître quoi est quoi. Bon, du coup, les puristes me pardonneront si je me mélange un peu les pinceaux. Allez zou, je me lance ! Voici donc (ou pas !), le Shah Burj.
À ses côtés, une petite dépendance dont je ne connais pas le nom permet de passer d’un palais à l’autre sans se faire voir.
De là, on a encore une belle vue sur la rivière Yamuni, et au loin, sur le Taj Mahal.
Toujours est-il que le Shah Burj possédait autrefois un plafond peint en bleu et or. Il est le plus bel exemple de sculpture du fort… Ce qui me fait croire que je suis sur la bonne piste !
Le long du mur d’enceinte, la foule est nombreuse à vouloir apercevoir son petit coin de Taj Mahal.
Oui, oui… Le petit truc blanc tout au fond, c’est bien le Taj Mahal. Pas facile à capter avec un 14 mm !
À l’intérieur du Shah Burj, on trouve une petite pièce jadis rafraîchie, l’été, par une cascade s’écoulant le long du marbre !
Bon alors, si je ne me trompe pas, celui-ci, c’est le Shish Mahal (à moins que !). On l’appelait autrefois le palais des glaces tant il contenait de morceaux de miroirs incrustés dans la pierre.
Pour accéder au palais impérial du Diwan-i-Khas, il faut grimper un escalier. Du coup, une fois arrivé au sommet, la surprise est totale. Tiens, un palais gigantesque ! Cette structure couverte sur trois côtés devait sans doute abriter une partie de la cour de l’empereur moghol.
Les parties inférieures des colonnes sont incrustées de motifs floraux, tandis que les parties supérieures sont peintes et dorées.
Le Diwan-i-Khas, ou le palais des audiences privées, était l’endroit où l’empereur mogholais recevait les courtisans et des invités de l’État. On l’appelait aussi Shah Mahal. Il se compose d’une cour centrale rectangulaire, entourée d’une série d’arcs qui s’élèvent sur deux étages.
Là encore, depuis l’arrière du pavillon principale, on a une vue fantastique sur la rivière Yamuni et le Taj Mahal dressé au loin, de l’autre côté de la rive.
Le bâtiment abritait autrefois des auvents rouges. Sur les arches des murs nord et sud, au-dessous de la corniche, sont inscrites les paroles d’Amir Khusrow : « S’il y a un paradis sur la terre, c’est ici. » Au plafond du grand pavillon, une inscription persane en rajoute encore quelque peu en comparant l’empereur à l’astre du jour.
Enfin, impossible de quitter de Diwan-i-Khas sans jeter un coup d’œil à la petite mosquée privée de Shah Jahan, Najina Masjid, bâtie entièrement en marbre blanc. Elle est surmontée de trois coupoles à bulbes terminées par des lotus renversés.
En redescendant l’escalier et en passant plusieurs corridors, on débouche naturellement sur le Diwan-i-Am, la grande salle des audiences publiques.
Flanquant le plus grand parterre du fort, le Diwan-i-Am, la salle des audiences publiques est une belle loge surélevée aux multiples arcades. C’est ici que l’empereur moghol s’adressait au peuple et à la noblesse.
Avec la chaleur étouffante qui règne aujourd’hui, la forêt d’arcades abrite surtout les pèlerins et les touristes en quête d’un peu de fraîcheur.
Le Diwan-i-Am se compose d’un hall d’entrée, ouvert sur trois côtés. La salle est divisée en 27 baies carrées soutenues par un système de colonnes qui supportent les arches. Le toit est traversé par des poutres de grès.
L’empereur moghol était séparé des courtisans par une balustrade dorée, tandis qu’une barrière d’argent s’étendait autour des trois côtés de la salle.
Bon autant le dire tout de suite, du Red Fort, c’est bel et bien mon endroit préféré, le seul qui soit en fait véritablement ouvert sur les jardins persans. Les proportions de cette salle, de ses colonnes et des arches gravées montrent une haute esthétique et une grande maîtrise de l’artisanat.
Avec une façade impressionnante de neuf ouvertures en arc gravées, le hall a été orné de gravier doré et blanc. Son plafond et ses colonnes étaient peints en or.
Le mur arrière est décoré de panneaux incrustés de pierres multicolores. Ils représentent des fleurs et des oiseaux. C’est ici que se cachaient, derrière les fenêtres en marbre ajourées, les femmes de l’empereur qui assistaient aux audiences sans être vues… 400 concubines au bas mot !
Cette belle visite vaut bien une chouette photo-souvenir. Mes amis Indiens veulent absolument de moi sur leur photo ! Du coup, je leur rends la pareille. Elle est pas belle, la vie !
Envers ou endroit du Diwan-i-Khas, je n’en sais pas grand-chose. Toujours est-il qu’en suivant mes amis indiens, je tombe nez à nez avec de superbes jardins persans. Et franchement, j’adore cet endroit.
Cette grande cour intérieure au centre de laquelle se dresse une petite fontaine en marbre est d’un charme infini. Chaque pièce de son jardin persan ressemble à une pièce de puzzle. Des essences différentes donnent plusieurs teintes de vert.
Cette magnifique découverte vaut bien une nouvelle photo avec mes amis. Toute la famille semble au complet. Trop sympas, ces Indiens !
Je profite du temps qui me reste pour retourner sur mes pas et admirer tranquillement les coulisses du palais de l’empereur. Sa belle vue sur la rivière Yamuna et le Taj Mahal, au loin.